Trouver l’équilibre entre aide et surcharge visuelle
La réalité mixte promet de guider un opérateur sur le vrai poste, sans l’arracher à son environnement. Encore faut-il trouver le bon équilibre entre aide et surcharge visuelle. C’est précisément l’objet du patron de conception “superposition fantôme” : afficher, directement dans le champ de vision, le geste de référence en transparence, au bon endroit, au bon moment… puis retirer l’aide lorsque la personne devient autonome. L’ambition est simple et efficace : accélérer la prise en main, réduire les erreurs, standardiser les repères d’un site à l’autre — sans transformer la scène de travail en sapin de Noël.
Comment fonctionne la superposition fantôme ?
Concrètement, l’opérateur garde la vue sur la machine, ses outils et ses collègues. Par-dessus, le système affiche une main fantôme ou un contour semi-opaque indiquant :
- l’endroit exact où poser la main,
- la direction du mouvement,
- parfois même l’amplitude attendue.
Cette couche reste discrète : elle n’occulte pas le réel, elle le souligne. Le geste est découpé en micro-étapes (aligner, pousser, verrouiller, contrôler), chacune brièvement signalée par un repère visuel ou un retour sensoriel : son sec, vibration légère ou flash discret. À mesure que la personne enchaîne les réussites, l’assistance s’allège : d’abord très présente, puis plus suggestive, et enfin quasi invisible. L’objectif n’est pas de créer une dépendance, mais d’organiser la sortie d’assistance.
Sur le terrain, l’expérience est simple. Prenons le remplacement d’un filtre. À l’approche de la machine, un halo fin dessine le bon carter et une flèche d’approche évite les hésitations devant les panneaux. Vient la phase de geste : la main fantôme montre un quart de tour dans le bon sens ; un compteur minimal s’affiche jusqu’à la butée. Si l’opérateur dévie franchement, un signal bref l’invite à corriger sans dramatique ni surcharge. Au troisième succès consécutif, la main fantôme disparaît ; ne subsiste qu’un “tick” haptique de confirmation. En quelques essais, le geste passe de l’explication à l’évidence.
Une approche standardisée et interopérable
Pour rester industrielle et déployable sur plusieurs sites et casques, la superposition fantôme s’appuie sur la norme OpenXR, qui évite l’enfermement chez un fabricant. Derrière l’écran, une petite bibliothèque d’interfaces regroupe les éléments récurrents :
- halos,
- mains fantômes,
- temporisations,
- règles de retrait progressif.
Cette approche garantit une grammaire visuelle cohérente sur différents matériels, avec des efforts de portage limités lors des renouvellements de parc. Les équipes de formation y gagnent une cohérence d’un site à l’autre, les équipes IT une maintenance prévisible et tout le monde évite de “réinventer” l’interface à chaque cas d’usage.
Des indicateurs simples pour mesurer l’efficacité
L’intérêt n’est pas que perceptif : il est mesurable. Trois indicateurs suffisent à piloter et améliorer le dispositif :
- Temps d’accès à la maîtrise : combien de minutes ou de jours jusqu’à l’autonomie ?
- Taux d’assistance : à quel point faut-il encore aider, étape par étape ?
- Concentration des erreurs : où se situent les blocages, et combien de temps durent-ils ?
Ces données, collectées sans lourdeur, alimentent une boucle d’amélioration continue : on simplifie une étape trop verbeuse, on renforce un repère peu lisible, on ajuste une temporisation trop brève.
À l’échelle d’un réseau de sites, cette traçabilité sécurise les décisions d’extension.
Limites et conditions de réussite
Le dispositif a des limites assumées. Pour des gestes ultra-précis, la superposition visuelle ne suffit pas toujours : on l’associe alors à des contrôleurs, à un gabarit physique ou à des retours haptiques plus marqués.
Et, comme toute solution visuelle, il faut tester en conditions réelles : lumière changeante, reflets, gants ou visières épaisses peuvent nécessiter un ajustement du contraste ou de l’épaisseur des traits. Ce réalisme d’implémentation fait la différence entre une démo séduisante et un dispositif fiable au quotidien.
En conclusion
Au final, la “superposition fantôme” n’est ni un gadget ni une surcouche spectaculaire. C’est une méthode sobre pour montrer juste ce qu’il faut au moment opportun, puis s’effacer quand l’opérateur a pris la main. Elle accélère l’apprentissage, lisse les écarts entre sites, et réduit la dette de maintenance grâce à OpenXR. Dit autrement : moins d’hésitations, moins d’erreurs, des gestes plus réguliers — et un déploiement qui tient la distance.